le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

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Pablo
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Pablo »

:Up: Toujours aussi documenté l'ami Jacky :applaudi:
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Geeks
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Geeks »

Une page d'histoire nous contemple :Up:

Bon, et bien, je pense que tu va nous ajouter ça dans le classeur ;)

Vivement la prochaine expo que je voie le Laubie à nouveau en action de ciblage :lol:

:trinque:
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Jacky-Soum
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Jacky-Soum »

Bonjour à tous ! ;)

Voici, comme promis, de nouvelles informations sur la sauvegarde de La Rochelle, qui m’ont conduit à effectuer une importante mise à jour du dossier.

Le dernier week-end d’Août 2015, j’ai fait un peut de tourisme à La Rochelle, occasion d’admirer une nouvelle fois les majestueuses tours du vieux port. :tirlangue:

La Rochelle le 21 Août 2015 - Les tours du vieux port vues de l'avant port.
Cherchez le chapeau de paille, je suis dessous !!!
:mrgreen:
Image

Mais pas seulement ! J’ai enfin pu visiter le Musée du Bunker de La Rochelle ! :woow:

La Rochelle le 21 Août 2015 - L'entrée du Bunker de la 3eme flottille.
Image

De quoi s’agit-il ?? :?:
D’un abri blindé construit par les Allemands en 1941, réservé aux officiers sous-mariniers de la 3eme flottille.
Il se situait sous « l’Hôtel des Étrangers », qui avait été réquisitionné dès Juin 1940 et comportaient tout l’équipement permettant de se mettre à l’abri d’éventuels bombardements : Infirmerie, cuisine, centrale de ventilation, bar décoré de peinture mural, armurerie et de nombreuses chambres dont une réservée à l’Amiral commandant la place.

Ce lieu oublié pendant de nombreuses années, a faillit être transformé en caves privatives en lien avec les appartements qui ont remplacé l’hôtel !!
Mais heureusement, un Rochelais passionné d’histoire l’a racheté et transformé en musée qui, initialement, était ouvert épisodiquement.

Et depuis Mai 2013, il est ouvert tous les jours et toute l’année, ce qui le rend beaucoup plus accessible ! :Up:

Pour ceux que cela intéresse, voici les coordonnées du site Internet, où une belle présentation est visible : http://www.bunkerlarochelle.com
En attendant, je vous livre quelques photos du lieu, réalisées lors de cette visite.

Dès l’entrée, le visiteur est accueilli par « le chat noir », emblème de la 3eme flottille.
Image

Dans chaque salle, une scène est reconstituée, avec des mannequins grandeur nature et, vous vous en doutez bien, la salle qui m’a le plus intéressé est
celle dédiée aux « Meilleurs Ennemis » MEYER et SCHIRLITZ ! ;)
Là, de nombreux documents et objets liés à ces deux hommes sont présentés sous vitrines dont voici quelques photos que j’ai incluses dans le dossier historique :

Voici l’uniforme que l’Amiral SCHIRLITZ portait lors de sa reddition le 9 Mai 1945.
Image

Ici, sa dague d’Honneur dont il fit le cadeau au C.F. Hubert MEYER.
On distingue en dessous le courrier que l’Amiral SCHIRLITZ envoya à l’Amiral MEYER en 1966 en remerciement du livre « Entre Marins » dédicacé qu’il venait de recevoir.

Image

Et pour finir, le diplôme de Citoyen d’Honneur décerné au Capitaine de Vaisseau Hubert MEYER par le maire de La Rochelle en 1948.
Image

Bien sur, il y a beaucoup d’autres documents, scènes reconstituées et maquettes,
ainsi que de magnifiques fresques peintes sur les murs, en parfait état de conservation ! :bave:
Mais je laisse le soin aux personnes intéressées de faire la visite, cela en vaut la peine !

A propos de maquette, j’ai été déçu par celle censée représenter l’U-766 ! :(
La maquette présentée est celle d’un VII-C-41, équipé d’un schnorchel que le 766 ne possédait pas encore, dont les couleurs ne correspondent absolument pas à celles de l’U-766 et, le pire, ils ne portent pas les trèfles à quatre feuilles, célèbres emblèmes de l’U-766 !!!
Mais je me dis que le créateur de ce musée n’est pas un spécialiste des U-BOOT et qu’il en est tout à fait excusable ! ;)

Remercions le plutôt d’avoir sauvé ce petit bout de l’histoire locale !!! :Up:

Voici maintenant les nouveaux documents que j’ai intégrés dans le dossier historique, afin que le nouveau lecteur les découvre dans leur contexte ; il s’agit essentiellement de 3 courriers que les Amiraux MEYER et SCHIRLITZ ont échangés après 1960, qui montrent clairement que ces deux hommes étaient des visionnaires, artisans de la construction de l’Europe, devenus des amis après avoir été placés dans la pire des situations !

--------------------------------

Rappelons que l’Amiral MEYER quitte la Marine en 1961 et devient maire de Royan, ville martyr qu’il s’appliquera à reconstruire pour en faire une grande cité balnéaire. Il a, entre temps, rédigé ses mémoires, bien avant de quitter la Marine, afin de faire taire les mauvaises langues au sujet d’une éventuelle collaboration sur la poche de La Rochelle, et faciliter le traitement équitable de certains prisonniers Allemands.

Le secret militaire lui imposait d’attendre 20 ans avant de pouvoir publier ce document, ce qu’il fait en Avril 1966.
N’oubliant pas sont ancien ennemi, il envoie un exemplaire de son roman"ENTRE MARINS" à l'Amiral SCHIRLITZ, avec la dédicace suivante :
à l’Amiral SCHIRLITZ qui fut mon ferme et loyal adversaire, je dédie ce livre au marin qui a hautement honoré son Pays dans la plus dure des épreuves.

Le livre est accompagné d’un courrier qui justifie l’existence de ce document et montre à quel point l’Amiral MEYER estime son ancien adversaire :

. Saint-Ciers, le 18 avril 1966
Monsieur l’Amiral

Vous m’aviez demandé en me quittant si j’écrirais le récit de notre commune aventure, et je vous avais affirmé que non. Or, il m’a fallut changer d’avis afin de venir en aide à nombre de mes anciens adversaires injustement traités. Mais il me fut interdit de publier ce récit en librairie, et de le diffuser avant vingt ans ! Devenu libre, j’ai remanié mon ouvrage pour en faire un livre.
J’ai tenté d’être aussi exact et aussi juste qu’un auteur peut l’être sur ses propres actions.
Je vous demande de me pardonner les erreurs ou omissions que j’aurai pu commettre. Soyez certain que je n’ai pensé qu’à rendre claire la belle histoire de deux marins ennemis qui ont défendu les intérêts de leur patrie et qui, les premiers, ont tracé entre nos deus Pays, la voie de la réconciliation et de l’amitié, et ont vu se lever l’aube de l’Europe.
Aujourd’hui, je veux, Monsieur l’Amiral, vous témoigner à nouveau ma très haute et déférente estime et échanger avec vous une fraternelle poignée de main, comme nous le fîmes, jadis, dans les pires circonstances.
Hubert Meyer


La réponse de l’Amiral SCHIRLITZ ne se fait pas attendre et montre que ces deux hommes au milieu de la tourmente, regardaient bien dans la même direction : l’avenir de l’Europe ! :woow:

. Kiel, le 24 avril 1966
Très honoré Monsieur l’amiral,

Vous m’avez causé une surprise et une joie extraordinaires lorsque ma femme m’a remis votre lettre en même temps que votre livre si judicieusement intitulé Entre Marins.
Il était clair, pour nous deux, que seuls, en tant qu’officiers de marine, nous pouvions mener à bien ce devoir insolite, du fait que l’expérience de la mer nous a appris à voir loin et qu’un marin est capable de comprendre un autre marin, fût-ce un adversaire.
Il va de soi que j’ai médité sur ce passé, sur notre comportement et sur cet accord, fruit de nos efforts communs qui marque le point culminant et l’aboutissement de ma carrière. J’ai conclu par ce dicton, en usage dans la marine Allemande : « Dieu y a mis le pouce ! » C’est-à-dire que lorsqu’il advient que deux navires sont sur le point de s’aborder et qu’il ne reste plus entre eux que l’espace d’un pouce, le choc peut encore être évité.
Sans doute usez-vous dans la marine Française de quelque maxime de ce genre, et je pense que vous-même, en tant que chrétien et en tant que protestant, ce que je suis, moi aussi, vous apprécierez cette formule et que, peut être, vous l’adopterez.
Cela ne diminue en rien la valeur non plus que la volonté tenace de l’officier d’élite et de l’homme lucide que j’ai reconnus en vous et présenté tel à mon entourage.
Certes, pour moi, la situation était des plus accablantes, surtout en raison des ordres que j’avais reçus et que j’ai transgressés au point d’en prendre le contre-pied. Mais je n’hésite pas à reconnaître que c’est à vous seul que revient l’honneur d’avoir, dès l’abord, pris les initiatives que commandait la situation. Elles ne pouvaient provenir que de vous, et vous les avez fait prévaloir, malgré les obstacles qu’y mettaient les vôtres, ce dont j’étais particulièrement informé. Ainsi êtes-vous parvenu à un heureux dénouement dont nous pouvons tous deux être fiers.
Et voici, maintenant, en conclusion d’une affaire qui fut pour nous deux si délicate, qu’un livre que j’espérais beaucoup voir paraître, et que j’ai lu passionnément, m’apporte la somme de vos opinions et de vos pensées, en même temps qu’une dédicace en forme d’hommage sans réticence qui semble jaillir du cœur.
Laissez-moi vous dire que j’en suis profondément ému, et qu’il en est de même de ma femme à qui j’ai lu quelques passages. Nous fûmes des adversaires. Mais aussi extraordinaire qu’il paraisse, nous savions pouvoir nous fier l’un à l’autre, parce que nos rapports étaient empreints d’une franchise totale, ce qui va de soi, entre marins de bonne trempe.
Amiral, je ne puis que vous exprimer mon cordial remerciement ni autrement ni mieux qu’en vous serrant fraternellement la main comme vous l’avez fait vous-même.
Ernst Schirlitz


L’original de cette lettre, exposé au Musée du Bunker de La ROCHELLE, est partiellement visible sur la photo de la dague d’Honneur de l’Amiral SCHIRLITZ, présentée plus haut. ;)

Dix ans vont encore passer avant que ces deux hommes d'exception, qui ont toujours maintenu le contact, ne se revoient en Août 1976, lorsque les époux MEYER sont reçus à KIEL chez l'Amiral et sa femme ; occasion pour les femmes, en pleur de pouvoir enfin tomber dans les bras l'une de l'autre et pour les hommes de reparler longuement de leur aventure commune.

Le destin ne leur laissera pas le temps de se revoir à nouveau car la mort frappe MEYER le 8 Septembre 1978 dans un accident de voiture dont sa femme réchappe gravement blessée.
Dés qu'elle le peut, Mme MEYER annonce la terrible nouvelle à l'Amiral SCHIRLITZ qui lui adresse un émouvant courrier reproduit ci-dessous.

Kiel, le 11 septembre 1978
Madame

Ému profondément par l’ébranlante nouvelle de votre accident et du décès de l’Amiral, je vous prie de croire à l’expression de ma condoléance et de la sympathie de Madame Schirlitz. Je sais bien considérer l’immense épreuve qui vous a été imposée par le sort et je suis plein de compassion avec votre douleur. Vous déplorez la perte d’un mari dévoué, la France celle d’un de ses grands hommes, et moi, je regrette la mort d’un ami.
Je commémorerai l’Amiral comme adversaire loyal en temps de guerre qui, avec moi, poursuivait le même but : celui de sauver la ville de La Rochelle, la vie de sa population et celle des soldats des deux côtés, sans négliger nos devoirs militaires envers nos patries réciproques. En laissant passer ma vie en rétrospective, vous me permettrez de dire que je suis fier d’avoir réussi à accomplir mon devoir de soldat sous l’obligation de l’humanité et grâce au secours persévérant de l’Amiral, d’un homme d’honneur et de raison. Et je garderai toujours reconnaissante mémoire à tout ce qu’il avait fait pour moi pendant mon incarcération injuste après la capitulation Allemande. Alors, déjà, l’adversaire de jadis s’était transformé en ami.
« Entre Marins », le souvenir de l’Amiral Hubert Meyer demeurera inoubliable et hautement honoré.
Quoiqu’il n’ait pas de mots pour amoindrir votre douleur, je vous souhaite, Madame, un soulagement de vos souffrances et rapide réconvalescence.
Veuillez accepter, Madame mes hommages respectueux et l’expression de ma condoléance sincère.

Ernst Schirlitz


Puis, malade, l’Amiral SCHIRLITZ s'éteint dans son sommeil dans la nuit du 27 au 28 Novembre de la même année, peut être 'pressé' de rejoindre...
'SON MEILLEUR ENNEMI', qui était devenu son PLUS FIDÈLE AMI.


--------------------------------------

Voila, tout est dit !! Ces deux hommes que le destin a mis en contact dans des circonstances dramatiques sont devenus au fil du temps deux amis
que même la mort n’a pu séparer…
;)

Les plus courageux reliront la partie modifiée du dossier, avec les nouveaux documents dans leur contexte, ici :
viewtopic.php?f=31&t=363#p4100
Ou, mieux, toute la 1ére partie ici, afin de bien se remettre l'ensemble de l'histoire en tête : viewtopic.php?f=31&t=363#p4098
Maintenant, si tout va bien, prochaine mise à jour après le 5 Décembre !! :excited:

Cordialement de Jacky-Soum :trinque:
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Teba
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Teba »

Bonjour, :)

Bravo, ça c'est du travail de recherche, passionnante histoire. :Up:
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Patjabix
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Patjabix »

Salut,
Un grand merci Jacky pour cette passionante et émouvante contribution :Up:
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alfa
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par alfa »

bonsoir
merci pour cette tres belle pages d histoire et de respect et d amitie . :Up: :Up:
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MG
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par MG »

Bonjour Jacky , merci beaucoup pour cette belle et émouvante histoire a très bientôt :Up:
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Rackham
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Rackham »

Excellent :Up: merci pour ces moments de lecture passionnante
Haddock : Messieurs, Cet homme est innocent : Tintin nous l’a dit. Allez-vous lui laisser ces menottes… et l’empêcher d’aller me chercher une bouteille de cognac ?
camerone
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par camerone »

Bonjour,

Je connais cette histoire, mon grand père a été un des premier fusiller marin du bataillon de Rochefort a monter à bord et en a profité pour "subtiliser" la machine a écrire du bord, que nous avons toujours.

camerone
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Jacky-Soum
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Re: le LAUBIE, ex U766 : son histoire.

Message par Jacky-Soum »

Bonjour Cameron ! :Up:

Là, je suis sans voix.... :Oo:

Pourrais-tu nous présenter une photo de cette machine à écrire ??
Et puis, peut-être que ton grand-père avait des anecdotes sur La Rochelle après la libération ???
Cela ajouterait un témoignage à cet historique, avec ton accord, bien sur... ;)
C'est fou, qu'après toutes ces années, on apprenne encore des choses concernant ce sous-marin ! :Oo:

Cordialement de Jacky-Soum :trinque:
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